Le « Renouveau » complophile et complophage versus l’opposition complophobe (2008-2023) : la politique du complot ou la complocratie au Cameroun ?

Abstract

Au Cameroun, qui dit changement dit complot contre le Chef de l’État ; qui fait objection à la présidence perpétuelle dit machination contre le système gouvernant ; qui propose une démarcation idéologique et philosophique dit nécessairement coterie contre la ligne politique du parti. Les entrepreneurs politiques font la politique avec le complot, confondent la politique au complot et font le complot avec la politique. La politique leur apparait comme une activité complexe donc le radiateur est l’intrigue. Héritiers de la longue tradition de promotion et d’instrumentalisation des arguments complotistes vieille de la lutte décoloniale, les opérateurs politiques camerounais contemporains suscitent, amplifient et sponsorisent inlassablement la circulation des thèses complotistes à l’effet d’enfermer l’opinion publique dans un labyrinthe où le complot est partout et sur tout. Cette contribution s’attèle à renseigner sur les usages politico-stratégiques des argumentaires complotistes à l’aune de la lutte pour la conquête et la conservation du pouvoir politique au Cameroun. Il s’agit de démontrer comment les acteurs politiques se servent des « vrais-faux complots », comment ils manipulent la presse et les masses sociopolitiques pour accomplir leurs agendas politiques. Dès lors, une question demeure, comment le « Renouveau » et l’opposition font-ils la politique du complot ? L’investigation documentaire, l’observation directe, les entretiens, le suivi des débats dans les médias classiques et modernes ont permis de collecter des données à même de satisfaire à l’exigence de démonstration. C’est dans une perspective d’inspiration constructiviste et d’interprétation interactionniste de type stratégique que nous faisons l’hypothèse que le « Renouveau » construit, s’attire et se nourrit des « théories du complot » pour se reproduire, face à l’opposition qui mobilise les raisonnements complotistes pour se préserver des « vrais-faux complots » et pour rebondir en politique.